Les Honduriens se rendent aux urnes dimanche pour une élection présidentielle qui s’annonce très serrée, un scrutin à un tour observé avec attention à l’international en raison d’accusations de fraude dans ce pays en proie à la corruption.
La plupart des sondages montrent une quasi-égalité entre les trois principaux candidats que sont Rixi Moncada, ancienne ministre de la Défense et membre de la formation de gauche Parti Liberté et Refondation (Libre), actuellement au pouvoir, Nasry Asfura, ancien maire conservateur de la capitale Tegucigalpa, et Salvador Nasralla, centriste et animateur de télévision.
L’Organisation des États américains (OEA) a récemment fait part de ses inquiétudes concernant le processus électoral, déclarant qu’il était de la responsabilité des autorités honduriennes de garantir l’autonomie et l’indépendance des agents électoraux.
Le secrétaire d’État adjoint américain Christopher Landau a également averti sur X que les États-Unis répondraient « rapidement et de manière décisive à quiconque porte atteinte à l’intégrité du processus démocratique au Honduras. »
Le président américain Donald Trump a apporté son soutien à Nasry Asfura, du Parti national, affirmant qu’il pourrait travailler avec lui pour lutter contre le trafic de drogue. « S’il ne gagne pas, les États-Unis ne gaspilleront pas leur argent », a déclaré Donald Trump sur les réseaux sociaux.
« Nous espérons qu’il n’y aura pas de fraude et que les élections se dérouleront pacifiquement », a déclaré Jennifer Lopez, une étudiante en droit de 22 ans à Tegucigalpa. « Ce serait un grand pas en avant pour la démocratie dans notre pays. »
MÉFIANCE À L’ÉGARD DU PROCESSUS ÉLECTORAL
Le Honduras, où six citoyens sur dix vivent dans la pauvreté, a connu un coup d’État en 2009 lorsqu’une alliance de militaires, de politiques et dirigeants d’entreprises de droite a renversé Manuel Zelaya, l’époux de l’actuelle présidente.
En 2021, les Honduriens ont massivement voté pour Xiomara Castro, mettant fin à plus d’un siècle de règne du Parti national et du Parti libéral.
Les élections de dimanche, au cours desquelles les 128 membres du Congrès, des centaines de maires et des milliers d’autres fonctionnaires seront également renouvelés, se déroulent dans un climat très polarisé.
Les trois principaux candidats s’accusent mutuellement de complot pour frauder les élections et Rixi Moncada a laissé entendre qu’elle ne reconnaîtrait pas les résultats officiels.
Le bureau du procureur général du Honduras, aligné sur le parti Libre, au pouvoir, a accusé les partis d’opposition de planifier la fraude électorale, ce qu’ils nient.
Les procureurs ont ouvert une enquête sur des enregistrements audio entre un homme politique de haut rang du Parti national discutant avec un officier militaire non identifié de plans visant à influencer l’élection. Ces enregistrements, qui, selon le Parti national, ont été créés à l’aide d’une intelligence artificielle, sont devenus un élément central de la campagne de Rixi Moncada.
L’armée hondurienne a également été critiquée pour avoir demandé au Conseil national des élections de lui fournir des copies des feuilles de décompte le jour de l’élection, ce qui constitue une violation de la loi hondurienne.
Ces tensions ont contribué à accroître la méfiance du public à l’égard des autorités électorales et du processus électoral en général. Il y a également eu des retards dans la fourniture du matériel de vote.
Dans cette atmosphère tendue, 6,5 millions de Honduriens devront décider s’ils poursuivent le programme social et économique de gauche de Xiomara Castro ou s’orientent vers un programme conservateur en soutenant le Parti libéral ou le Parti national.
Xiomara Castro, première femme à gouverner le Honduras, a augmenté les investissements publics et les dépenses sociales. L’économie a connu une croissance modérée et la pauvreté et les inégalités ont diminué, même si elles restent élevées. Le Fonds monétaire international (FMI) a salué la gestion budgétaire prudente de son gouvernement.
Le taux d’homicide dans le pays est également tombé à son niveau le plus bas de l’histoire récente, mais la violence persiste.
Les groupes de défense des droits de l’homme ont critiqué Xiomara Castro pour avoir maintenu un état d’urgence prolongé dans certaines régions du Honduras et pour avoir continué à s’appuyer sur l’armée pour le maintien de l’ordre, comme l’avait fait son prédécesseur, Juan Orlando Hernandez, qui purge actuellement une peine de 45 ans de prison aux États-Unis après sa condamnation pour trafic de stupéfiants. Donald Trump a déclaré vendredi qu’il avait l’intention de gracier Hernandez.
Les candidats à la présidence ont proposé peu de plans concrets pour résoudre les principaux problèmes du Honduras : le trafic de drogue, la corruption et la pauvreté.
Les élections seront suivies de près en Asie alors que Nasry Asfura et Salvador Nasralla ont tous deux déclaré qu’ils pourraient reprendre les relations diplomatiques avec Taïwan s’ils étaient élus. Les relations avec Taipei ont été rompues par le gouvernement de Xiomara Castro en 2023.
Une telle décision représenterait le plus grand revers diplomatique pour la Chine dans la région depuis 1990, lorsque le gouvernement nicaraguayen de Violeta Chamorro a rétabli ses propres relations avec Taipei.
(Reportage Diego Oré à Mexico et Laura García à Tegucigalpa, rédigé par Leila Miller ; version française Kate Entringer)





